Archives mensuelles : avril 2019

Les français seraient plutôt satisfaits de leur situation professionnelle

Les français sont-ils insatisfaits ou, au contraire, satisfaits de leur situation professionnelle ?
La réponse serait qu’ils sont plutôt satisfaits, voire très satisfaits contrairement à ce qu’ils peuvent dire de la société en général.

Abondamment commenté dans les médias, le dernier sondage en date mené par Gallup sur la motivation des salariés a fait grand bruit : à en croire l’institut, seuls 6 % des employés français s’affirment engagés au travail. Un taux qui en fait les salariés les moins motivés d’Europe. Particularités culturelles, chômage élevé, management paternaliste… toutes sortes d’arguments ont été avancés par des experts en ressources humaines afin de cerner l’origine de ce « mal français ».
Mais un nouveau sondage mené par Korn Ferry vient battre en brèche ce constat. Le cabinet de conseil a tenté, à son tour, de mesurer la motivation des salariés français. Et les résultats de son enquête sont nettement moins alarmants que le sondage réalisé par Gallup. Ainsi, 74 % des salariés français interrogés par Korn Ferry déclarent avoir de l’intérêt pour leur travail – un taux stable depuis cinq ans – et 75% déclarent éprouver de la « fierté » à travailler pour leur entreprise. (source : Le Monde 12 avril 2019)

Est-ce la sempiternelle problématique de la manière dont la question est posée ? Le contexte (quand, où est posé la question, avant quelles autres questions ?) n’induit-il pas des réponses à une même question qui peuvent être très variables?
D’un côté le sondage Gallup confirme que les français manifestent facilement leur mécontentement, mais de l’autre, le sondage Korn Ferry indique bien qu’en final, les français sont plutôt satisfaits de leur sort quand on les interroge sur leur situation propre, en particulier.

Les enquêtes récurrentes de l’INSEE (Enquêtes Statistiques sur les revenus et les conditions de vie (SRCV) de 2010 à 2017) indiquent que moins de 8% des français donne une note d’insatisfaction concernant leur emploi, et 71% donne une note de satisfaction (de 7 à 10 sur 10). Cette relative satisfaction diminue, elle était de 75% en 2010, mais cela montre une relative satisfaction vis-à-vis du travail qui corrobore les résultats du sondage de Korn Ferry.

Autre étude qui va dans le même sens : l’étude DEFIS réalisée par le CEREQ.
Même si celle-ci n’a pas pour sujet la satisfaction vis-à-vis de l’emploi, mais les parcours professionnels et la formation, il est donné une indication de la satisfaction des actifs salariés vis à vis de leur situation professionnelle selon leur parcours.
Ainsi 80% des salariés sont globalement satisfaits de leur situation professionnelle. Pour 1/3 d’entre eux, la situation n’a pas évolué entre 2014-2017, mais ils sont satisfaits du travail où leurs qualifications et compétences sont correctement utilisées, et les conditions de travail satisfaisantes. Pour les autres 2/3, en plus de conditions de travail satisfaisantes et d’une bonne utilisation des compétences,  il y a eu en sus une évolution de l’emploi qui s’est traduit pas une hausse de niveau de responsabilité, d’autonomie, d’intérêt du travail, avec augmentation de salaire. Ainsi pour 80% des français, qu’il y ait eu une évolution ou pas de leur emploi, la situation professionnelle est  globalement satisfaisante.
En revanche, pour 20% des salariés, le parcours professionnel est moins satisfaisant. Le travail est déclaré pénible, répétitif, perçu comme peu rémunéré, ne correspondant pas aux qualifications ou sous-utilisant les compétences. Pour 40% d’entre eux (8% des salariés), le parcours est défini comme « heurté » avec un changement de fonction, de poste ou d’établissement, correspondant à une baisse du niveau de responsabilité, d’autonomie, d’intérêt du travail et/ou à des conditions de travail dégradées. Pour ces 20% de salariés, la situation professionnelle est considérée, on peut aisément le comprendre, comme insatisfaisante.

De ces 3 études (Sondages Korn Ferry, Enquêtes SRCV de l’INSEE, Enquêtes DEFIS du CEREQ), il ressort bien que 75% à 80% des salariés sont plutôt satisfaits de leur travail, seulement 20% plutôt insatisfaits, et 7 à 8% très insatisfaits.
On est très loin des résultats du sondage GALLUP.
Ce qui est intéressant de souligner est que la satisfaction sur la situation professionnelle, n’est pas dominée par la question de la rémunération, mais semble-t-il assez largement par la bonne utilisation des qualifications et des compétences, par la progression vers plus d’autonomie, de responsabilité, et d’intérêt du travail. La valorisation du travail n’est pas (uniquement) une question monétaire : la qualité de vie au travail, la reconnaissance du client, de la hiérarchie et des collègues, la possibilité d’évoluer, de progresser… sont des éléments qui comptent (aussi).

Hugues JURICIC, le 12 avril 2019

Télécharger le note Bref du CEREQ sur les résultats de l’enquête DEFIS : Bref374-web

Les français déclarent être plutôt satisfaits de la vie qu’ils mènent.

Analyse de la satisfaction des français sur la vie qu’ils mènent

Source : Insee, enquêtes Statistiques sur les revenus et les conditions de vie (SRCV) de 2010 à 2017

Champ : France métropolitaine, personnes âgées de 16 ans ou plus vivant en ménage ordinaire.

Analyse : Hugues JURICIC (avril 2019)

La note de satisfaction donnée par les français sur leur vie menée diminue légèrement entre 2010 et 2017, mais avec une assez grande variation due entre 2012 et 2013 où l’on peut constater un décrochage en 2013 (l’enquête est réalisée en décembre de l’année).
La distribution de la note donnée évolue de façon un peu plus marquée. Si la proportion des français les plus insatisfaits de leur vie (note de 0 à 4) diminue en passant de 8,3% à 6,0%, la proportion des plus satisfaits (note de 9 et 10) diminue aussi en passant de 25,6% à 18,3%.
C’est la catégorie des français relativement satisfaits (note de 7 et 8) qui a augmenté de façon passant de 46,8% à 55,0%.
La proportion des français très et plutôt satisfaits (note de 7 à 10) a légèrement augmenté en passant de 72,4% en 2010 à près de 73,3% en 2017, et celles des français très ou plutôt insatisfaits de leur vie (note de 0 à 6) a légèrement diminué en passant de près 27,7% à 27,4%. Ces deux tendances inverses se compensant, la note moyenne apparaît quasiment identique entre 2010 et 2017.
En décomposant la note de satisfaction donnée à la vie menée selon les différents aspects de la vie, on retrouve l’évolution légèrement à la baisse avec la relativement forte chute en 2013 immédiatement compensée par une hausse les années suivantes.
On retrouve cette évolution pour la satisfaction vis à vis du logement (logement environnement et localisation) ou de l’emploi mais pas pour les loisirs.
Il est remarquable que la satisfaction pour le logement soit systématiquement supérieure à la satisfaction globale ou à la satisfaction vis-à-vis de l’emploi. En revanche, la satisfaction vis-à-vis des loisirs est systématiquement plus faible, mais elle augmente sur la période.
La satisfaction de la relation avec les amis ou la famille se situe à un niveau élevé, très élevé même en comparaison avec la satisfaction concernant les loisirs. Les enquêtes de 2010 et 2011 ne mesuraient la satisfaction relative à cet aspect de la vie, mais l’évolution entre 2012 et 2017 des deux indicateurs montrent une forte similitude avec le logement ou le travail.
Les moyennes des notes données indiquent assez nettement que les français sont plutôt satisfaits chez eux, en famille ou avec leurs amis, que l’emploi finalement est plutôt satisfaisant et que l’insatisfaction la plus grande concerne les loisirs, mais cela s’améliore un peu.
La satisfaction de leur logement (logement, localisation et environnement) est plutôt grande. La proportion de français très satisfaits (note de 9 et 10) est même particulièrement élevée (30,1% des français en 2017) et, à l’opposé, celle des français très ou plutôt insatisfaits (note de 0 à 6) est relativement faible (19,2% en 2017).
L’évolution est très faible entre 2010 et 2017, la relative baisse de 2013 qui a été compensée les années suivantes concerne surtout les français les plus satisfaits de leur logement.
Concernant l’emploi, la proportion des français très satisfaits est plus faible (19,8% en 2017) et est en diminution depuis 2010, la baisse de 2013 n’ayant pas été compensée les années suivantes. Et à l’opposé la proportion des français insatisfaits (note de 0 à 6) est en nette augmentation passant de 24,6% à 29,2%, la hausse débutée en 2013 s’étant poursuivie les années suivantes.
Du point de vue de l’emploi, on peut dire qu’il y a eu une dégradation de la situation de l’emploi en 2013 qui s’est poursuivie et confirmée les années suivantes, et semble-t-il même amplifiée en 2017.
L’emploi apparaît bien comme une préoccupation centrale dans la satisfaction des français sur leur vie menée en général.
En ce qui concerne les loisirs si la note moyenne s’est améliorée, il faut prendre en considération que 35,2% des français sont très ou plutôt insatisfaits de leurs loisirs. Cela peut être multifactoriel, correspondre à une offre de loisirs insatisfaisante mais aussi un manque de temps ou d’argent pour avoir des loisirs de façon satisfaisante.
La proportion des français insatisfaits tend toutefois à diminuer, puisqu’ils étaient 41,3% en 2010 et 35,2% en 2017, alors la proportion de ceux qui sont très satisfaits reste quasiment constante autour de 20%.
Les français sont plutôt bien chez eux, un peu moins bien au boulot mais globalement ils s’embêtent un peu (ou n’ont pas le temps ou l’argent pour avoir des loisirs satisfaisants).
En 2017, une proportion plus importante était peu satisfaite de ses loisirs (35% avec une notre de 0 à 6 sur 10) contre seulement 19% pour leur logement et 29% pour leur emploi, et 27% de façon générale.
La proportion des très satisfaits de façon générale (note de 9 ou 10 sur 10) représentant 18% des adultes, mais 30% pour les très satisfaits pour leur logement ( !) et 20% pour l’emploi ou les loisirs.

Satisfaction selon le genre
Très peu de différence entre les hommes et les femmes, une très légère meilleure satisfaction des hommes. Une même évolution avec une légère dégradation en 2013 alors que cela semblait aller mieux entre 2010 et 2012.

La satisfaction concernant le logement est quasiment identique entre les hommes et les femmes. Pas de différences non plus vis-à-vis de l’emploi.
Pour les loisirs, la satisfaction des femmes est moins grande que celle des hommes, mais avec une tendance à l’amélioration pour les femmes. Sans aucun doute le facteur temps pour les loisirs joue en défaveur des femmes.
Pas de différence en ce qui concerne les relations avec les amis ou la famille.
La seule différence entre la satisfaction (moyenne) entre les hommes et les femmes concerne les loisirs et cette différence s’est atténuée entre 2010 et 2017.

Evolution entre 2014 et 2017 de la satisfaction selon les déciles du revenu du ménage.
L’argent ne fait pas le bonheur mais il semble y contribuer. Mais pas tant que cela !
Il y a bien une progression de la satisfaction (moyenne) plus le revenu augmente mais l’écart entre le 1er décile (10% des personnes dont le revenu du ménage est le plus bas) et le 10ème décile (10% des personnes dont le revenu du ménage est le plus élevé) n’est que de 1,1 (note moyenne de 6,5 contre 7,6 en 2017). Il baisse même entre 2014 et 2017, la satisfaction moyenne des premiers déciles augmentant légèrement alors que celui des derniers déciles diminuent légèrement En ne considérant que la proportion des personnes déclarant un indice de satisfaction inférieure à 7, on observe bien la dégressivité de la relative insatisfaction selon le niveau de revenu.
On voit aussi que l’insatisfaction relative diminue entre 2014 et 2017 pour les plus bas revenus et augmentent pour les plus hauts… Cela semble assez en contradiction avec les revendications exprimées dans les mouvements sociaux de la fin 2018.

Distribution des niveaux de satisfaction selon le type de zone urbaine d’habitation
En 2017, la proportion des très satisfaits et des moins satisfaits apparaît assez peu affecté par le fait d’habité dans des unités urbaines de plus ou moins grandes importances. Elle est même étrangement identique entre le fait d’habiter dans une métropole ou dans une commune rurale !
Ce serait dans les zones urbaines de taille moyenne (50 000 à 200 000 habitants) qu’il y aurait la plus grande insatisfaction (31% des personnes avec un indice inférieur à 7 et seulement 14% avec un indice supérieur à 9).

Télécharger le document avec les graphiques :
La satisfaction des français sur leur vie de 2010 à 2017

L’acte de naissance des 11 OPCO a été publié : un réel gain en cohérence pour l’essentiel.

L’acte de naissance des OPCO opérateurs de compétences est publié le 29 mars 2019 dans le journal officiel.

Les OPCO remplacent les OPCA qui collectaient et géraient les fonds à la formation des salariés. Maintenant la collecte est assurée par l’URSSAF et les OPCO gèrent une partie seulement de la formation continue des salariés.

Ils financent notamment les contrats de professionnalisation et de conversion par alternance et les contrats d’apprentissage ainsi que les actions de formation au bénéfice des salariés des TPE-PME (accompagnement des entreprises de moins de 50 salariés dans le développement des compétences). Ils sont aussi en charge de l’analyse des besoins et l’évolution des certifications professionnelles des branches constitutives de l’OPCO (amplification de la mission d’observatoire prospectif des métiers et des qualifications).

La création de 11 OPCO sont officiellement agréés (arrêté du 29 mars 2019) :

Opco Commerce vente, négoce, commerce de détail, commerce de gros…
Atlas assurances, banques, finances
Santé hospitalisation, établissements médico-sociaux…
AFDAS presse, édition, cinéma, casino, musique, spectacle vivant, sport, tourisme, radio, audiovisuel, télécommunication…
Cohésion sociale centres socio-culturels, animation, insertion, Pôle emploi, régie de quartier, HLM,…
Entreprises de proximité artisanat, professions libérales…
Entreprises et salariés des services à forte intensité de main-d’œuvre chaînes de restaurants, portage salariale, enseignement privé, restauration rapide, activité du déchet, travail temporaire…
OCAPIAT les entreprises et exploitations agricoles, les acteurs du territoire et les entreprises du secteur alimentaire…
OPCO 2i industrie, métallurgie, textile…
Construction bâtiment, travaux publics
Mobilité ferroviaire, maritime, automobile, transport de voyageur, tourisme…

Le nombre de 11 OPCO a été préconisé dans le rapport de mission de René Bagorski et Jean-Marie Marx de 2018 avec comme objectif d’obtenir des filières de économiques cohérentes afin de mutualiser les solutions offertes aux entreprises. Les partenaires sociaux ont négocié au sein des branches sur la base du rapport Bargoski-Marx, sans doute fortement incités par le Ministère du travail. Aussi, le résultat obtenu est très proche des propositions du rapport.

Il y a à l’évidence une réelle cohérence dans les regroupements, ce qui ne veut pas dire que cela a été évident à négocier pour les regroupements les plus hétérogènes. Et puis les relations passées entre certaines branches, parmi les plus petites, ont certainement pu empêcher des regroupements qui auraient pu être plus naturels au regard des activités.

Ainsi on peut s’étonner de voir à l’Atlas, l’OPCO des banques et assurances, les entreprises de l’informatique, de l’ingénierie, des études et du conseil, ou bien les économistes de la construction ou les géomètres., alors que les experts automobiles qui travaillent principalement pour les assurances sont au sein de l’OPCO des entreprises de proximité.

Dans le même genre, l’Afdas comptent les branches des organismes de tourisme et de l’hébergement de plein air qui seraient plus naturellement au sein de l’OPCO de la mobilité.

Les branches du sport et du golf qui se trouvent également à l’Afdas auraient pu être plus naturellement au sein de l’OPVO de la cohésion sociale, dans la mesure où leur activité relève en grande proportion du monde associatif.

On peut ainsi relever quelques cas d’incohérence, ou en tout cas de faible cohérence. Mais cela ne doit pas retirer l’effort remarquable de mise en cohérence qui se traduit par des OPCO très cohérents pour les principales branches. Le problème est que les petites branches qui peuvent se trouver en faible cohérence avec les autres branches de l’OPCO, risquent d’être mal desservies par l’OPCO, d’autant plus mal si les branches sont constituées de TPE-PME et si elles sont elles-mêmes peu organisées avec de faibles moyens consacrés à la question de la formation et une faible représentation au niveau des régions. Il y aura très certainement un besoin de regroupement des petites branches en faible cohérence, de façon à qu’elles puissent mieux se faire entendre dans la gouvernance ou des services de l’OPCO.

Hugues JURICIC, le 2 avril 2019.

Télécharger Liste des branches regroupées par OPCO